18.6.12

Voir le hasard. Bernard Plossu' s photographies of Giverny



A Marianne, pour son anniversaire















1 Vue de la fenêtre de Monet à Giverny, photographie Bernard Plossu
2 Catalogue de l'exposition 
3 Monet dans son jardin, photographe inconnu







Depuis longtemps Bernard Plossu s'est débarrassé du grand angle pour un appareil Nikkormat équipé d'un objectif de 50 mm, objectif le plus proche de la vision humaine. Pour capter la poétique de l'espace propre à Monet et à sa vision de Giverny, il a choisi de travailler sur des formats miniatures (11,4x7,6) pour les tirages noirs et blancs. "La miniature concentre la lumière, impose au spectateur de s’approcher et d’entrer dans l’image. Pour voir le hasard, il faut être dans cet état de disponibilité que permet l’extrême concentration." Les photographies en couleur sont des tirages mats au charbon de Fresson, les photographies en noir et blanc sont tirés sur du papier ton chaud de Guillaume Geneste. C'est en 1967 que Bernard Plossu a rencontré les fils et petit-fils de Théodore-Henri Fresson, l'inventeur du procédé du même nom. Débute alors une relation d'amitié entre le photographe et le maître-tireur Pierre Fresson: "J’ai immédiatement eu le coup de foudre, je ne m’attendais pas à ce qu’un tirage restitue aussi fidèlement les couleurs et l’ambiance du moment. C’est le papier mat qui permet cette sensation, avec le papier brillant, pour moi, c’est trop clinquant. Avec Fresson, pas de couleurs agressives et chaque tirage est unique, il y a presque du relief. On effleure les saisons, les arbres vibrent, le vent murmure… En un mot, Michel Fresson est mon traducteur."

Monet intime Photographies de Bernard Plossu
Exposition du 8 juin au 31 octobre 2012 
Musée des impressionnismes de Giverny

Catalogue Monet intime, Bernard Plossu à Filigranes Editions



Claude Monet s'est installé à Giverny à l'âge de 43 ans, il y est resté 43 ans. Il a donné couleur et matière à son rêve de maison. Aveugle, il a continué de peindre en se fiant au numéro sur ses tubes de peintures. Il n'a pas pu atteindre son rêve mais il est mort en s'en approchant. Pour un éclairage phénoménologique sur sa rêverie de l'espace, quelques extraits du texte de Gaston Bachelard , La poétique de l'espace. Un livre à prendre comme livre de chevet , à lire et à rêver dans le silence, la lenteur et la solitude d'un espace clos, d'un nid, d'une coquille.

Pour une étude phénoménologique des valeurs de l’espace intérieur, la maison est, de toute évidence, un être privilégié, à condition, bien entendu, de prendre la maison à la fois dans son unité et sa complexité, en essayant d’en intégrer toutes les valeurs particulières dans une valeur fondamentale. ... A travers le souvenir de toutes les maisons où nous avons trouvé abri, par delà toutes les maisons que nous avons rêvé habiter, peut-on dégager une essence intime et concrète qui soit une justification de la valeur singulière de toutes nos images d’intimité protégée ?
Car la maison est notre coin du monde. Elle est— on l’a souvent dit— notre premier univers. Elle est vraiment un cosmos. Un cosmos dans toute l’acception du terme. Vue intimement, la plus humble demeure n’est-elle pas belle ? … Dès lors tous les abris, tous les refuges, toutes les chambres ont des valeurs d’onirisme consonantes.  … Les vrais bien-être ont un passé. Tout un passé vient vivre, par le songe, dans une maison nouvelle. … Dans ces conditions, si l’on nous demandait le bienfait le plus précieux de la maison, nous dirions : la maison abrite la rêverie, la maison protège le rêveur, la maison nous permet de rêver en paix. … La maison dans la vie de l’homme, évince des contingences, elle multiplie ses conseils de continuité. Sans elle, l’homme serait un être dispersé. Elle maintient l’homme à travers les orages du ciel et les orages de la vie. Elle est corps et âme. Elle est le premier monde de l’être humain. Avant d’être «jeté au monde », comme le professent les métaphysiques rapides, l’homme est déposé dans le berceau de la maison.   
Chapitre 1 La maison de la cave au grenier,  le sens de la hutte

Sometimes the house of the future is better built, lighter and larger than all the houses of the past, so that the image of the dream house is opposed to that of the childhood home…. Maybe it is a good thing for us to keep a few dreams of a house that we shall live in later, always later, so much later, in fact, that we shall not have time to achieve it. For a house that was final, one that stood in symmetrical relation to the house we were born in, would lead to thoughts—serious, sad thoughts—and not to dreams. It is better to live in a state of impermanence than in one of finality.
Chapter 2 House and Universe





Gaston Bachelard, La poétique de l'espace, PUF, 1958.
















1 comment:

  1. Bel accès à l'intime. Et une pépite de récoltée. C'est super !

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