29.10.14

Excursion into Philosophy. Gustav Deutsch's Visions of Reality


Space is a play with the possible

















En jouant avec la mise en espace et la mise en scène des visions de réalité que la méditation de la peinture d'Edward Hopper lui évoque, Gustav Deutsch nous offre avec Shirley, un pur objet de cinéma où l'architecte cinéaste pousse à ses limites la géométrie orthogonale et révèle la subversion spatiale des mises en scène du peintre. Avec sa compagne l'artiste plasticienne, Hanna Schimek, il travaille la palette de couleurs du peintre, jusqu'à l'obsession, jusqu'à nimber le film d'un jaune citron qui n'est pas sans rappeler la métaphysique des Annonciations. Avec son directeur de la photographie, Jerzy Palacz, il règle les lumières et parfait l'illusion. La référence à l'univers d'Emily Dickinson et au mythe des cavernes de Platon ainsi que le travail non moins élaboré de la bande son qui matérialise la présence/absence du hors champs et du rapport de l'intériorité et de l'extérieur ne laisse pas de nous interroger sur un monde à double fonds où l'invisible serait la doublure du visible et sa part la plus vive, où à la mémoire collective se superposent mémoires individuelles et intimes. 

  
A lire, le passionnant interview de Gustav Deutsch par Karin Schiefer.










8.10.14

The Voice of Things. Les secrets de l'entr'ouvert


A Janus, dieu des commencements et des fins,
 des choix, des clés et des portes






















Une porte ouverte dont la présence au premier plan fait la part belle à son chambranle et à son envers panneauté, une autre à peine esquissée dont la forme cintrée ne laisse entrevoir son ouverture que par son absence, signifiée par un pan de lumière plus intense, les plis d'un lé de rideau dans l'ombre se substituent à la présence d'un majordome silencieux qui présiderait à l'ouverture et à la fermeture, au passage et au chemin ; un carrelage en damier accentue la perspective pour mieux orienter notre regard vers le secret de cette porte qui se dérobe dans l'élévation vers la lumière, vers le théâtre de l'entr'ouvert de la peinture d'intérieur du Siècle d'or hollandais. La frontière objet-sujet s'abolie dans la douceur des dégradés de gris et le velouté d'une impression aux pigments, dans les jeux de lignes et de plis d'une écriture de lumière. L'oeil se tient sur cet entre deux où il recueille l'énergie des mutations, des passages et des flottements d'un monde où le silence remue, où les frontières vacillent, où n'est pas perçu ce qui croit percevoir, où croît et s'accroît la vie muette et profonde des choses.* 





LES PLAISIRS DE LA PORTE


 Les rois ne touchent pas aux portes.


 Ils ne connaissent pas ce bonheur: pousser devant soi avec douceur ou rudesse l'un de ces grands panneaux familiers, se retourner vers lui pour le remettre en place, - tenir dans ses bras une porte.


 ... Le bonheur d'empoigner au ventre par son nœud de porcelaine l'un de ces hauts obstacles d'une pièce; ce corps à corps rapide par lequel un instant la marche retenue, l'œil s'ouvre et le corps tout entier  s'accommode à son nouvel appartement.


 D'une main amicale il la retient encore, avant de la repousser décidément et s'enclore, - ce dont le déclic du ressort puissant mais bien huilé agréablement l'assure.      




Francis Ponge,  Le parti pris des choses



Friederike von Rauch


La Galerie Particulière 
16 rue du Perche 
Paris 3

La Galerie Particulière
14 place du Châtelain
1050 Ixelles Bruxelles 





Photographies © Friederike von Rauch, Série Sleeping Beauties, 2011

*Texte, J'attends